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Ecrire le patois, une langue comme les autres
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  • Cherche contact avec les patois du sud de la Saône et Loire, du nord-ouest du Rhône et du nord-est de la Loire: Charolais, Brionnais, Haut Maconnais, Haut Beaujolais, Nord-Est Roannais...le pays du tse.... Michel Lapalus Contact : mlapalus@sfr.fr
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15 juillet 2011

Le patois de Saint Bonnet des Bruyères (69) canton de Thizy

   Autrefois, les paysans s’inventaient des histoires absurdes pour se moquer d’eux-mêmes. Aujourd’hui, ils n’ont plus le temps. I corran, i corran ; ils courent, ils courent…Comme tout le monde. En plus les paysans se font de plus en plus rares, du moins les paysans qui restent paysans ! Alors de temps à autre, une histoire d’avant, ce n’est pas si mal que ça…

Le B’no de Tsi Badzo ou le Benoît de chez Bajard, un conte de la région de Saint Bonnet des Bruyères –San Bone(une commune du Rhône limitrophe du sud de la Saône et Loire) envoyé par Jean-Pierre Ducroux de Saint Christophe la Montagne-San Cretoul.

“Les Bajards” sont un hameau de Mussy sous Dun, mais rien ne prouve que c’est là son origine. Les contes voyagent  avec les conteurs. (Texte et orthographe du patois sont de la région et diffèrent peu du patois brionnais)

 

                                                           Le B'no de Tsi Badzo

Cliché le B'no 1Cliché le B'no 2

Cliché le B'no 3Cliché L' B'no 4    

 

                                                        Le  Benoît de Tsi Badzo

 

  Il y avait à Tsi Badzo deux vieux garçons. Ils faisaient bon ménage le Benoît et son frère le Guste. Avec deux ou trois vaches, un âne, ils gagnaient leur pain. Certains les disaient un peu avares, mais , il n’y avait pas d’argent dans la bourse, ni d’écus cachés dans le cendrier. Quand ils vendaient un veau, ils allaient au bistrot faire un peu la bringue ; ils n’étaient pas malheureux. Mais depuis quelques temps le Guste n’allait pas bien : il avait grossi et n’avait pas de forces. Il prenait des envies de vomir et avait des sueurs froides. Il finit par se coucher pour de bon et rester au lit. Le Benoît faisait tout le travail, dehors et à la maison.

Un matin, en se levant, le Benoît qui avait réfléchi dit au Guste : « Guste, j’ai envie d’aller voir le médecin de Tramayes » . « Vas-y si tu veux, que répond le Guste, mais je n’aime guère les remèdes. « Il faudra bien faire ce qu’il te dira, ces hommes en savent plus que nous ; cela te soulageras quand même. »  «  Vas donc chez le pharmacien, cela te coûteras moins cher ! » Autrefois, les pharmaciens faisaient un peu tous les métiers ; ils soignaient à la fois les hommes et les bêtes.

  Pour aller à Tramayes il faut bien deux heures et demi à pied, et encore sans s’amuser ; une bonne trotte ! Quelques uns avaient des tapes-culs à cheval, mais les deux frères n’en avaient pas. Le Benoît part donc à pied avec son bâton. Il arrive à Tramayes essoufflé et en nage. Il explique au pharmacien la maladie de son frère. Le pharmacien comprenait un peu le patois. Il dit au Benoît : « Il me faudra un peu d’urine pour une analyse. Tenez ce flacon et allez en chercher. » 

  Le Benoît n’était pas bête et il avait bien compris ce qu’il fallait faire. Il se retrouve dehors avec ce flacon à remplir, mais tout de même un peu embarrassé. « Deux heures et demi et deux heures et demi.. cinq heures, c’est trop long pour retourner à la maison »…se disait-il en se promenant par le bourg. Il y avait des chevaux et des juments attelées à des tapes-culs, des belles bêtes. Tout d’un coup, il en voit une qui pissait à plein seau. Il s’approche avec son flacon ouvert, vite rempli ; il le rebouche et attend une bonne heure avant de le porter à la pharmacie où on lui dit :  « Revenez dans une heure. »  Le Benoît en profite pour aller boire un verre ; de voir pisser cette jument, lui avait donner soif. Et de penser à ces cinq heures de marche, il a demandé un second verre. Il en a encore bu un à la santé du Guste, il fallait bien !       Quand il est revenu, le pharmacien lui a fait une ordonnance et lui a expliqué : « Rien de grave, la grossesse est normale, faire prendre le remède matin et soir ; il faut l’atteler sans hésiter ». « Il faut que je l’attelle ? » _  « Oui, sans crainte, vous verrez, ça lui fera du bien, le remède va lui donner du nerf. »

  « Bougre » fait-il en sortant, « je ne sais pas s’il va se laisser faire, mais c’est écrit sur l’ordonnance »

  Il était presque nuit quand il est rentré à Tsi Badzo. « Guste, voilà ton remède pour te  remettre en forme ; demain, nous attelons pour aller arroser les prés avec la tonne à purin. Le pharmacien l’a dit ; c’est écrit sur l’ordonnance ! »

 Le remède n’était pas mauvais, mais le Guste ne dormit rien de la nuit. Il remuait sans arrêt, respirait fort et s’agitait dans son lit.

  Le lendemain de bon matin, dès l’aube le Benoît est venu réveiller le Guste : »Allez Guste, il faut atteler, c’est écrit ». Le Guste pensait  qu’il s’agissait d’atteler l’âne ; mais non ! le Benoît l’a poussé dans les brancards :  « C’est ça le remède, Guste ; il l’a dit, c’est écrit ; tu l’as bien vu…ça vaut le coup de le faire pour te guérir… »

  Et, ils sont partis sur les chemins à tirer la tonne à purin. Le remède de cheval qu’il avait pris avant de partir lui avait fait grand bien. Il courait vite , le Benoît pouvait à peine le suivre. Tout d’un coup, le Guste s’arrête et crie :  « Dételle-moi, ça presse, ça presse !! Le Benoît le détache et notre Guste court vers un buisson. Il était grand temps, à peine baissé,  le Benoît entend un bruit de tonnerre à répétition comme une mitrailleuse ! Et derrière la haie, il voit un lièvre qui s’enfuit à travers champs. « C’était donc ça qui t’embarassait ; à présent ,mon pauvre Guste te voilà guéri !! »

  Depuis le temps a passé et le Guste n’a plus jamais été malade….

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Commentaires
M
Monsieur de la Fontaine aurait pu en faire une fable "Le B'no, l'Gust ape l'placebo"!
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