Le pu ch'tit
On a beaucoup accusé les paysans d’autrefois d’être âpre au gain (près d’leus sous, rapia,cretou, sârré d’la creupire…) . Mais sans assurance maladie, sans retraite, sans aide aucune en cas de fortes gelées, de sécheresse, il fallait bien économiser sou à sou.Et bien souvent ce n’était pas suffisant. L’histoire qui suit n’est ni critique, ni risible ; elle est juste ordinaire. Question conflits d’intérêts et amour de l’argent, le monde d’aujourd’hui semble mal placé pour donner des leçons !
Le pu ch’tit
Y fa·yo dza bié du temps qu’le ch’tit Touâne éto vaule vés la grand’ Maria.La grand’ Maria éto eune grande beule feune qu’avo predu son pére quand ôl avo tsé du piantsi. L’Toine, qu’avo été affremé p’eune an·née avo fini pe tsomé vés la Maria.
Ma l’Toine achteûre éto vaule pi pas vaule, pramou qu’la Maria l’avo mis dans son yê. Bié seûr l’Toine avo pas di non, ma ôl avo pas sondzi à tot.
« Bin di don l’Touâne, achteûre t’fâ partie d’la mazon ; y é pu la pou-ine qu’dze te baille des sous à la San Martin p’le 11 novembe »
« Y-é quand min-me ma qu’va vende les viaus apeu les cotsons ? »
« Corre pas si vite l’ch’tit Toine, pre san, faudro qu’ nos sa·yin maryi »
« Hé bin y-é pas maulézi, nos an qu’à s’maryi ! »
« T’vouâ bin qu’y-é pas possib·ye, l’monde diro qu’ nos san maryi en tsande »
Bié seûr, y avo qu’la Maria volo pas latsi son beutin. L’Touâne avo quand min·me fini p’ava un papi c’man qu’la Maria li d’vo des sous ; un papi qu’ô randzo tos les 11 novembe dans sa borse.
Ma l’Touâne volo ava sa vatse à lu .Eune né, la Cabète. eune des quate vatses d’la Maria avo fâ dous viaus.
« La Maria, t’va bin m’en bailli yun ; te m’da bin san depeu qu’dze su itié ! »
« Un viau qu’te va neûrri davu l’lâ d’mes vatses, un viau qu’va mandzi mon fouin pi mon arbe, fau pas y sondzi l’Touâne »
«Quand dze sondze à tot les sous que t’me dâ …T’porro bin….. »
« Couèze-te voua ! teutes les an·nées dz’te signe un papi p’la San Martin »
« Des papis, des papis ! dze va bin meûrri u mi·yeu d’tes papis ! Si t’éto eune vraie feune de parole, te devro m’vreussi des intéréts su les sous que te m’da. Dze travaille tote l’an·née pre ta épi i fau enco que dz’te prète des sous!! »
« Acueute-vouâ l’Toine, nos va pas s’batte ; t’vou atraudé un viau ! t’vou atraudé un viau !!! t’a qu’à en prende yun pre ta, ma à eune condichon, fau qu’te preune le pu ch’tit… !!
Le plus petit (une cogestion difficile )
Depuis déjà longtemps, le ch’tit Touâne travaillait comme ouvrier agricole chez la grande Maria. Cette dernière, une belle femme, avait perdu son père à la suite d’une chute Le Touâne qui avait été embauché pour une année, avait fini par rester chez la Maria.
Mais, l’Touâne était à la fois domestique et pas domestique, parce que la Maria avait fini par le mettre dans son lit.. ! Bien sûr le Touâne n’avait pas dit non, mais, il n’avait pas songé à tout !
« Dis donc, l’Touâne, maintenant, tu fais partie de la maison, ce n’est plus la peine que je te paye à la date du 11 novembre pour la Saint Martin… »
« C’est quand même moi qui vais vendre les veaux et les cochons ? »
« Ne cours pas si vite, l’Touâne, pour ça , il faudrait qu’on soit mariés ! »
« Ce n’est pas difficile, on peut se marier tout de suite. »
« Tu vois bien que ce n’est pas possible, tout les gens du village diraient qu’on ne marie pas une grande femme avec un petit homme ! »
Bien sûr, la Maria voulait continuer à gérer ses affaires. Le Touâne avait tout de même fini par obtenir un papier où la Maria disait lui devoir de l’argent ; un papier qu’il rangeait soigneusement tous les 11 novembre dans sa bourse.. !
Mais le Touâne voulait avoir une vache à lui. Une nuit, la Cabète, une des quatre vaches de la Maria, avait eu deux veaux.
« La Maria, il va falloir que tu m’en donne un ; tu me dois bien çà depuis que je suis là. »
« Un veau que tu vas nourrir avec le lait de mes vaches, un veau qui va manger mon foin et mon herbe, il ne faut pas y penser ! »
« Quand je pense à tout l’argent que tu me dois….Tu pourrais bien… ! »
« Tais-toi, tous les ans je te signe un papier le jour de la Saint Martin ! »
« Des papiers, des papiers !! Je vais mourir au milieu de tes papiers. Si tu étais une femme de parole, tu devrais me verser des intérêts sur l’argent que tu me dois. Je travaille toute l’année pour toi et il faut encore que je te prête de l’argent !! »
« Ecoutes, on ne va pas se battre… Tu veux élever un veau, tu veux élever un veau.. !!! Tu peux en prendre un, mais à une condition : tu choisis le plus petit… !!